MalgrĂ© le fait que la dĂ©tresse psychologique survient chez la grande majoritĂ© des personnes atteintes d’une maladie grave, la plupart des cliniciens en soins palliatifs ont peu ou pas de formation en santĂ© mentale. Cette annĂ©e, le propose lors de la confĂ©rence un tout nouvel atelier intensif d’une journĂ©e entière pour mieux Ă©quiper les cliniciens Ă faire face Ă la dĂ©tresse psychologique et aux comorbiditĂ©s liĂ©es Ă la santĂ© mentale. Ěý
Les Drs et (co-prĂ©sidents) ainsi que les Drs Danielle Chamas, Leah Rosenberg et Amanda Moment (confĂ©rencières) animeront un atelier d’une journĂ©e intitulĂ©e « PalliPsych : Appliquer les connaissances psychiatriques et psychothĂ©rapeutiques pour enrichir les soins palliatifs », le 15 octobre 2024 au Congrès international des soins palliatifs de 9IÖĆ×÷ł§Ăâ·Ń. L’atelier se dĂ©roulera Ă©galement en français, il sera coprĂ©sidĂ© par les Drs Marc Hamel et Marie Solange Bernatchez avec les confĂ©rencières Dres Annie Tremblay et Stefanie Gingras. ĚýLa mission de PalliPsych est de contribuer au domaine plus large des soins palliatifs en intĂ©grant des connaissances et des compĂ©tences Ă haut rendement issues de la psychiatrie et de la psychologie par l’éducation, la formation, la recherche et les bourses d’étude.
Devon Phillips a interviewĂ© deux des fondateurs du programme PalliPsych, les Drs Daniel Shalev et Keri Brenner, par Zoom, de leurs bureaux Ă New York et Stanford, respectifs. Ěý
Keri Brenner (KB) : Ce qui nous pousse Dan et moi-mĂŞme Ă offrir cette formation est que dans le domaine des soins palliatifs, environ 80% des patients Ă©prouvent un certain degrĂ© de dĂ©tresse psychologique en raison de leur maladie grave. Mais simultanĂ©ment, nous disposons de donnĂ©es qui montrent qu’environ 80% des cliniciens en soins palliatifs et en mĂ©decine palliative dĂ©clarent avoir peu ou pas de formation en santĂ© mentale. Et 80% des programmes de bourses et de mĂ©decine palliative aux États-Unis ne proposent pas une seule sĂ©ance d’enseignement incluant des psychothĂ©rapies sur la façon d’aider les gens Ă faire face Ă une dĂ©tresse psychologique ou Ă des comorbiditĂ©s de santĂ© mentale. Ěý
Cette lacune a donc Ă©tĂ© un Ă©norme catalyseur pour Dan, moi-mĂŞme et beaucoup d’autres qui sont formĂ©s comme psychiatres en soins palliatifs, ou qui ont une formation en psychologie et qui travaillent dans le domaine des maladies graves, pour nous amener Ă rĂ©flĂ©chir à « comment pouvons-nous crĂ©er des modalitĂ©s dans le curriculum acadĂ©mique pour offrir un programme Ă©ducatif de niveau supĂ©rieur dans notre domaine? » Ce que nous proposons aujourd’hui reprĂ©sente la prochaine frontière des soins palliatifs. Il s’agit d’une formation plus intense qui inclut une formation psychiatrique et psychologique primaire pour accroitre les connaissances et compĂ©tences. Ainsi, tout clinicien en soins palliatifs et en hospitaliers se sentira Ă©quipĂ© pour soigner des patients souffrant de dĂ©tresse psychologique. Ěý
Daniel Shalev (DS) : J’ajouterai un peu Ă cela. Keri et moi, ainsi que plusieurs de nos collaborateurs, sommes les membres du corps professoral de l’atelier prĂ©-confĂ©rence. Nous avons tous fait une rĂ©sidence en psychiatrie ou une formation en santĂ© mentale, par la suite, nous sommes arrivĂ©s aux soins palliatifs. Nos observations sur les lacunes en matière d’apprentissage se trouvent en rĂ©alitĂ© en deux catĂ©gories. La première est que bon nombre des compĂ©tences que nous utilisons en psychothĂ©rapie et en santĂ© mentale peuvent amĂ©liorer la façon dont nous parlons aux gens atteints de maladies graves quel que soit leur Ă©tat de santĂ© mentale. Il existe des stratĂ©gies de communication qui transcendent le diagnostic et qui constituent la base de la seconde moitiĂ© de la journĂ©e, est très axĂ©e sur ce que nous pouvons retenir de la psychothĂ©rapie pour l’offrir Ă tous nos patients atteints de maladies graves pour les aider Ă ĂŞtre capable de parler de sujets difficiles, comme la mortalitĂ© et les dĂ©cisions en matière de soins. Mais nous rĂ©alisons Ă©galement qu’en tant que cliniciens en soins palliatifs, nous sommes chargĂ©s d’offrir beaucoup de soins en santĂ© mentale spĂ©cialisĂ©s, non seulement en utilisant de bonnes compĂ©tences en communication, mais aussi en gĂ©rant de nombreux troubles ou symptĂ´mes complexes de santĂ©. Et cela se reflète mĂŞme dans les lignes directrices sur le champ de pratique des soins palliatifs. Ěý
Si vous examinez les lignes directrices d’orientation pour diffĂ©rentes catĂ©gories de maladies en soins palliatifs, comme l’insuffisance cardiaque ou la dĂ©mence, elles incluent toutes des symptĂ´mes psychologiques comme critères d’orientation vers des soins palliatifs. Notre projet de consensus des lignes directrices nationales sur la qualitĂ© pour les soins palliatifs, qui dĂ©finissent essentiellement notre champ de pratique, incluent un domaine complet sur les aspects psychologiques et psychiatriques des soins. Keri et moi, notre passion et notre vision c’est vraiment de penser Ă la fois sur quelles sont les composantes des soins spĂ©cialisĂ©s en santĂ© mentale qui pourraient ĂŞtre appliquĂ©es Ă tous les patients pour nous aider dans notre travail, et sur la manière d’amĂ©liorer les compĂ©tences des cliniciens en soins palliatifs pour rĂ©pondre aux besoins qui leur sont demandĂ©s par le système. Ces cliniciens doivent travailler comme une sorte de cliniciens primaires en santĂ© mentale auprès des personnes atteintes de maladies graves. Ěý
DP : Passons un peu Ă quoi les gens qui viennent Ă la confĂ©rence peuvent s’attendent. Dites-moi comment se dĂ©roulera la journĂ©e, quels seront vos domaines d’intervention. Ěý
DS : Nous voulons vraiment donner aux gens l’occasion de profiter de cette journĂ©e complète qui aborde Ă la fois « comment prendre soin des personnes qui ont des besoins spĂ©cifiques en matière de santĂ© mentale » et « que pouvons-nous retenir des pratiques de santĂ© mentale pour tous nos patients ». La première moitiĂ© de la journĂ©e est consacrĂ©e au modèle mĂ©dical de la psychiatrie. Nous rĂ©flĂ©chirons Ă la manière dont nous pouvons amĂ©liorer notre capacitĂ© Ă diagnostiquer les problèmes de santĂ© courants chez nos patients en soins palliatifs? Comment dĂ©pister la dĂ©pression, l’anxiĂ©tĂ© et le dĂ©lire en milieu de soins palliatifs? Comment pouvons-nous amĂ©liorer notre capacitĂ© Ă mieux utiliser des mĂ©dicaments pour traiter la dĂ©pression et l’anxiĂ©tĂ© chez les patients en soins palliatifs? Il faut vraiment faire appel Ă des experts Ă l’interface de la santĂ© mentale et des soins palliatifs et essayer de crĂ©er un cadre permettant aux cliniciens de soins palliatifs de se sentir plus en confiance pour diagnostiquer et gĂ©rer les problèmes de santĂ© mentale courants. Je laisserai Keri dĂ©crire l’objectif de l’après-midi. Ěý Ěý
KB : La seconde moitiĂ© de la journĂ©e aborde les aspects psychologiques de la prise en charge des patients atteints de maladie grave, sachant que la grande majoritĂ© des patients atteints d’une maladie grave Ă©prouvent une certaine forme de dĂ©tresse psychologique, mĂŞme s’ils n’ont pas de comorbiditĂ©s formelles de santĂ© mentale telles que la dĂ©pression majeure. Nous allons parler de formulation, qui consiste essentiellement Ă essayer de connaitre le « pourquoi » des pensĂ©es, des comportements, expĂ©riences et rĂ©actions du patient et de sa famille et nous donner un moyen de crĂ©er une hypothèse sur leur difficultĂ©. Souvent, nous pouvons utiliser notre propre contre-transfert, nos propres Ă©motions et rĂ©actions, pensĂ©es, sentiments, expĂ©riences, pendant que nous sommes dans la pièce avec le patient comme clĂ© pour dĂ©bloquer cette connaissance sur ce qui pourrait se passer chez le patient lui-mĂŞme. Il s’agit donc d’être en phase avec ce que la famille du patient pourrait vivre, ainsi que plus conscient avec ce que nous vivons nous-mĂŞmes. Nous examinerons quelques stratĂ©gies et techniques de mise en Ĺ“uvre Ă haut rendement que nous pouvons utiliser au chevet du patient pour Ă©lever et enrichir notre travail afin d’optimiser l’adaptation des patients et de leurs familles, ainsi que d’optimiser notre propre rĂ©silience et notre bien-ĂŞtre en tant que cliniciens. Ěý
DP : Excellent. Ça semble que ça sera une journĂ©e extraordinaire avec une gamme de sujets diffĂ©rents qui seront tres pratiques pour les gens. Quels cliniciens bĂ©nĂ©ficieraient d’assister Ă votre sĂ©ance? Ěý
KB : Cette journĂ©e est vĂ©ritablement rĂ©servĂ©e aux cliniciens qui s’occupent des patients atteints de maladies graves. Nous essayons vraiment d’optimiser l’équipe multidisciplinaire. Au sein de notre Ă©quipe de formateurs, nous comptons des psychiatres, des mĂ©decins en soins palliatifs, des psycho-oncologues, des psychologues et des travailleurs sociaux car nous souhaitons apporter une vision interdisciplinaire globale Ă ces sujets importants. Infirmiers praticiens, adjoints aux mĂ©decin, mĂ©decins, infirmières, travailleurs sociaux, aumĂ´niers, tous les membres de l’équipe interdisciplinaire peuvent en bĂ©nĂ©ficier. Ěý
DP : Parlons un peu du programme en français. Comment ça va fonctionner? A quoi peuvent s’attendre nos collègues francophones? ĚýCela a Ă©tĂ© un tel plaisir et une telle joie pour nous. Dès le dĂ©part, nous avons notre Ă©quipe Ă 9IÖĆ×÷ł§Ăâ·Ń, l’équipe francophone, qui ne se contente pas de traduire ce que nous faisons, mais qui s’engage activement Ă contribuer au contenu et Ă garantir que le contenu est pertinent au QuĂ©bec et au contexte canadien et au contexte international. Nous les rencontrons rĂ©gulièrement pour discuter de la manière de nous assurer que notre session trouve un Ă©cho auprès des deux publics. Et nous avons constituĂ© une Ă©quipe interdisciplinaire, tant du cĂ´tĂ© francophone que du cĂ´tĂ© anglophone. Cela reflète nos diffĂ©rentes façons de penser les soins aux patients et les ressources dans nos diffĂ©rents contextes. Nous sommes très heureux! Ěý KB : Ça Ă©tĂ© un rĂ©el plaisir de travailler avec les prĂ©sidents francophones, Dr Marc Hamel et Dr Solange Bernatchez. Nous sommes enchantĂ©s d’avoir cette collaboration. Ěý
DP : Avoir des sessions simultanĂ©es en francais et en anglais sera une excellente façon de lancer la confĂ©rence. La dernière parole est Ă vous : quel message aimeriez-vous envoyer aux cliniciens en soins palliatifs du monde entier? Ěý
DS : En prenant soin des personnes atteintes de maladies graves, que nous en soyons conscients ou non, nous prodiguons des soins de santĂ© mentale. C’est un Ă©lĂ©ment essentiel de nos soins et plus nous sommes en mesure de nous en occuper, mieux c’est. Les gens s’en abstiennent parce qu’ils peuvent avoir l’impression qu’ils ne sont pas formĂ©s pour cela, et c’est vrai, et pourtant, c’est devant nous et c’est le travail que nous devons faire. MĂŞme si c’est l’aspect que vous aimez le moins en tant que clinicien en soins palliatifs. J’encourage les gens Ă y assister. Ěý
DP : D’après les donnĂ©es de notre enquĂŞte menĂ©e lors de 15 sĂ©ances plenières diffĂ©rentes aux Etats-Unis, 95% des participants ont dĂ©clarĂ© que cette formation Ă©tait extrĂŞmement prĂ©cieuse. Le taux de satisfaction Ă©tait vraiment Ă©levĂ©. Ěý
KB : Je pense que cela dĂ©montre qu’il existe dans notre domaine une soif de connaissances et de compĂ©tences accrues pour prendre soin des patients souffrant de troubles de santĂ© mentale. C’est une façon pour les gens de se sentir vraiment autonomes et dotĂ©s d’un ensemble de compĂ©tences psychiatriques et psychologiques de base pour prendre soin de tout patient qu’ils voient souffrant d’une maladie grave. La journĂ©e est un apprentissage très engageant, interactif et expĂ©rimental pour garantir qu’il rapporte beaucoup Ă la pratique quotidienne. Notre objectif est que lorsque les gens qui viendront Ă l’atelier le lendemain, la semaine prochaine, le mois suivant, lorsqu’ils verront des patients ils auront les connaissances et les compĂ©tences pour appliquer immĂ©diatement ces techniques dans leur pratique quotidienne. Ěý
Pour plus d’information :
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Traduction par : Suzanne LeBlanc
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